Anhédonie devant la culture des Kebs
Bienvenue sur Tourniquet, l’infolettre d’Olivier Niquet sur la bêtise médiatique et politicienne, l’urbanisme et l’anhédonie (en tout cas, pour cette fois-ci).
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La semaine de relâche arrive à grands pas, ce qui veut dire pour moi que la saison de hockey de mes garçons achève. Je pourrai bientôt faire relâche de mon deuxième job de père d’aréna et me consacrer aux vraies affaires comme écouter des balados de potins sur Canadien, finir mon Lego de la NASA et aller porter mes bouteilles vides.
Québécophobie dans les écoles.
En attendant, j’ai été un peu troublé par la chronique de Jean-François Lisée dans Le Devoir de samedi dernier. Il y décrit une atmosphère dans certaines écoles secondaires de Montréal qui confine à la détestation du Québec. Il parle entre autres de Regina Assumpta (à dix minutes de chez moi) où l’anglais serait la langue prédominante dans les corridors. Il cite aussi une source selon qui « les élèves détestent les francophones. On fait la vie très dure à ceux qui veulent parler français et défendre le fait français : ils sont humiliés et dénigrés en personne et sur les réseaux sociaux ». Au Québec, c’est comme ça qu’on vit n’a peut-être pas bien passé. Je ne saurais dire. Il y a sûrement plus que ça.
Ça m’a troublé parce que c’est à côté de chez moi, parce que ce sont des jeunes de l’âge de mes enfants et parce que je suis sensible à la préservation de la culture québécoise. Je me méfie un peu des anecdotes de M. Lisée. Le fait que Rafaël Provost de la « Caravane de la tolérance » confirme que c’est un phénomène réel, ajoute toutefois de la crédibilité à ces histoires. Depuis, M. Lisée a récolté d’autres témoignages. Comme il le dit si bien à la fin de sa chronique à propos de cette dynamique: « il m’apparaît urgent de mieux la documenter et de mieux la comprendre ». En effet, je ne me fierais pas entièrement à lui, comme vous ne devriez pas vous fier entièrement à moi.
Anecdote pour anecdote, j’ai demandé à un ami dont le fils fréquente Regina si l’anglais était effectivement la langue de ses coulisses et il m’a dit que, oui, il y a plusieurs élèves qui parlent anglais, mais que les francophones (qui sont minoritaires dans ce collège), ne sont pas ostracisés. Quant à mes enfants qui fréquentent un autre collège tout près, ils me disent qu’il y a parfois des élèves des groupes d’anglais enrichi qui se parlent en anglais, mais que ce n’est pas fréquent. Je vous parlais dernièrement des jeunes anglophones dans l’équipe de hockey pour laquelle je suis assistant-entraîneur. Ils s’adressent à nous en français et s’ils parlent entre eux dans la langue de Cole Caufield, ils ne se moquent jamais des francos de l’équipe.
Dans tous les cas, j’ai un sentiment (un feeling comme ils disent à Regina Assumpta) qu’il y a une réelle tendance derrière ça. Je vois mes ados utiliser des expressions venues de toutes les langues et j’entends quelques-uns de leurs amis parler avec un accent plus près de celui de la banlieue parisienne que de la banlieue de Sorel. Le balado « Ainsi soit chill » de Jérôme 50 a bien démontré toute la richesse du langage des jeunes de par ses emprunts à toutes les cultures. J’en suis! Faudrait juste pas que ça se fasse au mépris de l’accent et de la culture québécoise.
On peut avoir l’impression que c’est ringard d’être québécois pour ces jeunes (pas les miens, là là). Cela dit, je suis pas mal sûr que les ados de mon temps ne trippaient pas tellement non plus sur la culture Québ et avaient aussi leurs expressions propres (celles dans la chanson thème de Watatatow). La différence, c’est que maintenant, ils ne sont pas confinés à la culture québécoise. Ils n’ont pas les Filles de Caleb et Lance et compte comme seules options. Ils sont sur les réseaux sociaux et les plateformes de diffusions américaines. Si leurs parents ne les invitent pas à consommer les séries, les films, les livres et la musique d’ici, ils y seront pas mal moins exposés que nous l’étions. Sauf que leurs parents sont aussi sur les réseaux sociaux et les plateformes de diffusion américaine.
C’était différent dans le temps des clubs vidéos. D’ailleurs, URBANIA en a recensé quatre encore existant au Québec.
Les gouvernements auraient dû voir venir il y a longtemps que la culture québécoise allait être en péril si on laissait les compagnies étrangères faire ce qu’ils veulent. Mais rien n’a bougé et nous voici maintenant dans une position précaire où les nouvelles générations sont en partie déconnectées de ce qui se fait localement. Et ils ne le sont pas par choix. Lorsqu’ils consomment ce que l’on fait de meilleur, ils adorent ça. Même que selon un récent sondage, 87% des Québécois sur TikTok consomment du contenu en français.
Chez les Québécois francophones, 37 % affirment que la province où ils vivent est « une part importante » de leur identité, et 90 % disent s’identifier à « la culture canadienne-française ». Un pourcentage semblable, soit 91 %, s’identifie également à la « culture canadienne ».
Bon, j’aimerais savoir ce qu’est la « culture canadienne », mais c’est une autre histoire. Bref, ce n’est pas tout noir et si on réussit à aller où les jeunes sont, ils vont se sentir interpellés et éventuellement, peut-être un peu plus fiers d’être québécois.
Transphobie dans les écoles
Je n’ai toutefois pas d’anecdote à évoquer sur cette autre tendance dans nos écoles, telle que rapportée par le journal 24h:
«Depuis un an, on sent un certain ressac au niveau de l’homophobie, mais surtout de la transphobie. Pendant les formations dans les écoles, des jeunes ont ouvertement des propos haineux. Certains demandent même à être libérés de ces ateliers. Et c’est déjà arrivé que l’école accepte pour des raisons religieuses ou parentales.» La montée des incidents envers les communautés LGBTQ+ dans les écoles n’est pas étrangère à celle des courants de droite aux États-Unis et au Canada.
Le phénomène aurait pris de l’ampleur suite à la controverse autour des drag queens qui lisent des histoires aux enfants. Comme quoi les médias et politiciens qui attisent l’animosité des gens sur des sujets qui ne les touchent absolument pas, ont des répercussions réelles.
Plogues
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La culture de la dopamine
Une de mes infolettres préférées, Sentiers, pointait cette semaine vers un texte fort éclairant d’un certain Ted Gioia sur l’état de la culture en 2024:
L’auteur y explique que le secteur en plus forte croissance de l’économie culturelle est la distraction et que les TikTok de ce monde en sont responsables.
Même le divertissement le plus stupide ressemble à Shakespeare comparé à la culture de la dopamine. Vous n’avez pas besoin de Hamlet, une photo d’un hamburger suffira. Ou une vidéo de quelqu’un qui twerk, ou d’un animal qui a l’air maladroit. Au lieu de films, les utilisateurs reçoivent une séquence infinie de vidéos de 15 secondes. Au lieu de symphonies, les auditeurs entendent de petites mélodies, généralement accompagnées d’une de ces petites vidéos - juste assez pour une dose de dopamine, et pas plus.
Les réseaux sociaux carburent à la dopamine et non plus au plaisir ou à l’élévation intellectuelle. Selon lui, « plus les accrocs comptent sur ces stimuli, moins ils reçoivent de plaisir. À un certain point, ce cycle crée une anhédonie, l’absence totale de jouissance dans une expérience censée être faite pour le plaisir. » Ça ne devrait pas être comme ça. On devrait pouvoir utiliser ces plateformes sans que le « cartel de la dopamine » nous impose cette sorte de lobotomie.
Bref, je suis en train de vous dire qu’il faut investir ces plateformes pour faire rayonner notre culture, mais que ces plateformes sont en train de nous rendre débiles. Vous voyez bien que je suis désespéré.
Cory Albert
Cory Albert en est un qui joue bien avec la dopamine. J’ai déjà parlé de cet influenceur de l’immobilier à la radio. TVA Gatineau a fait un reportage au sujet et ça ne fait pas un beau portrait du personnage.
@tva.gatineauCory Albert émerge sur les réseaux sociaux comme un investisseur immobilier qui est devenu riche à partir de rien. Nous nous penchons sur le soutien familial qu’il a reçu pour l’achat de son premier immeuble. #TVA #TVANouvelles #Gatineau #Québec #pourtoi #fyp #coryalbert47 #immobilierqc #actualite #logements #propriétaire #immeuble #locataire #riche #argent #famille #investisseur #immobilier
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Le gars s’est fait endosser par sa mère et a emprunté l’argent de sa grand-mère pour acheter son premier immeuble, mais ne jugeait pas nécessaire de rembourser cette dernière. Je sais pas s’il parle de ça dans sa formation pour devenir riche avec l’immobilier…
Climatoscepticisme
J’admire le courage des gens comme Alain Lépine, qui a étudié en science atmosphérique et qui essaie de déconstruire le discours des climatosceptiques qui ont étudié dans leur sous-sol.
Il répond à Reynald Duberger qui lui demande des preuves par des études scientifiques, mais M. Duberger ne veut rien savoir de ses preuves, évidemment.
Fox News
Bien aimé ce passage de l’émission de Jimmy Kimmel sur la couverture de Fox News de l’économie américaine (c’est à 7 minutes environ):
Si j’avais plus de temps, j’aimerais faire l’équivalent avec nos médias…
Musique
Une nouvelle chanson de Vampire Weekend:
Citations
🔈 Geneviève Guilbault, à propos des consultations sur le transport à Québec
– Est-ce que oui c’est possible de répondre plusieurs fois? Oui, mais c’est pour ça que je vous dis qu’il n’y a pas de prétention scientifique à cette affaire-là.
– Donc, ça sert à quoi finalement?
– Nous, on part du principe, bien écoutez, ça sert à ce que les gens, moi je parle du principe que la très grande majorité des gens à Québec ou sur la Rive-Sud qui veulent s’exprimer vont y aller de bonne foi. S’il y a des gens qui décident d’y aller 100 fois, 20 fois, 30 fois, soit. Mais à un moment donné, nous, les codes postaux, t’sais, faut qu’t’emprunte un code postal, pis t’sais…
– Mais c’est les trois premières lettres du code postal, ça peut être n’importe qui, finalement, pis on peut dire n’importe quoi.
– Oui, ben oui, mais ça repose aussi en quelque part sur la bonne foi, là.
🔈 Luc Lavoie, à propos de François Legault
On a des problèmes à donner des services aux réfugiés qui rentrent ici, alors nous sommes dans une crise humanitaire. Il est tu malade, lui? Il est tu malade, ce gars-là, lui?
🔈 Éric Duhaime, à propos des enfants d’immigrants en CPE
C’est sûr que le contribuable qui nous écoute, que ça fait trois ans qu’il attend sur une liste d’attente, qu’il voit un immigrant et qu’on lui dit « il va passer en avant de ta fille », de ton gars, je le comprends d’être enragé. Il paye des taxes comme un singe, pis ce gars-là se fait dire qu’il y a quelqu’un qui n’a jamais payé une cenne qui va passer en avant de toi.
🔈 Pierre Fitzgibbon, à propos des journalistes
Les gens qui veulent inventer des histoires devraient écrire des romans. Les militants devraient publier des essais. Les jeunes rigoureux, curieux et impartiaux qui veulent couvrir l’actualité politique je les encourage à devenir journalistes.
🔈 Pierre Poilievre, pour les rues
– Je sais que les éco-extrémistes comme Steven Guilbeault et le Bloc ne veulent pas investir dans les rues. […] On va bâtir des rues et supporter des industries qui permettent…
– Vous voulez construire des routes au Saguenay-Lac-Saint-Jean, M. Poiliève? Lesquelles?
– En général, à travers le pays, on est pour les rues, on est pour leur entretien.
🔈 Éric-Ralph Mercier, à propos du chestage à Québec
L’intimidation pour moi c’est quand tu t’en vas chester un membre du conseil, et là Stevens il est généreux, il dit à deux pouces de la face là, on parle de quelques millimètres du visage là. Moi pour moi c’est une agression envers ma personne. Moi, je vous dis, ce qui m’insulte le plus, là, poigne le doigt pis tape-moi sur l’épaule de même, là. Moi, pour moi, c’est une agression, là. J’ai quasiment le goût de me revirer pis de t’en swinger un, là, t’sais, tu comprends?
🔈 Patrick Paquet, à propos des caïds de Québec
Avant, tsé, on avait un peu, là, les genres des caïds qui se promenaient, là, tsé. Tsé, on avait des médaillons dans le cou, un Camaro, pis là, on était un petit peu plus dur, on avait 17–18 ans. Mais là, écoutez, si vous vous promenez dans Saint-Émile et quelqu’un vous approche comme citoyen et vous dit « Eille, t’as deux chars dans ta cour toi! », la première chose que vous devrez regarder c’est « Est-ce qu’il y a des espadrilles? ». S’il y a des espadrilles de couleur, ça, ça peut que ce soit maintenant les nouveaux caïds verts de l’équipe Marchand, vous comprenez? Ça, c’est les nouveaux caïds de l’hôtel de ville, maintenant, ils sont en vélo et ont des espadrilles rouges. Je voulais quand même prévenir à vos auditeurs.
🔈 Jean-François Caron, après avoir été désinvité d’un comité au parlement
Malheureusement, lorsque je vois l’évolution de la société démocratique au Canada, ce qui m’arrive aujourd’hui, c’est une anecdote parmi bien d’autres anecdotes, il y a un pattern qui est en train de se développer, qui est très malheureux, et lorsqu’on regarde ce pattern-là, et qu’on compare avec le même pattern dans les sociétés autoritaires, on se rend compte que malheureusement, il n’y a plus vraiment de différence-là. […] Moi, j’enseigne la théorie politique à mes étudiants, et lorsque je leur explique c’est quoi la démocratie, je ne leur donne certainement pas l’exemple du Canada en ce moment-là.
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