Comment devenir un expert, la montréalisation de Québec et un ours anthropomorphe
C’est ma dernière semaine de « vacances » avant de recommencer à travailler sur La journée. De retour en ondes le 21 août. Il me reste encore quelques jours pour aller tester le Rigolfeur. Ç’a l’air le fun si je me fie à ce récit gonzoesque.
Je suis allé voir Oppenheimer cette semaine avec mes ados. En anglais. À Laval. Après quelques minutes, je me suis dit que les deux allaient trouver ça long, trois heures de messieurs qui parlent de choses qu’ils connaissent plus ou moins dans une langue qu’ils maîtrisent au deux tiers. En sortant, ils m’ont fait croire qu’ils avaient réussi à suivre. Je les crois brillants, mais aussi très orgueilleux. Pour une critique du film, je vous suggère en passant le balado « Les voyeurs de vues » avec Alex Rose et Yannick Belzil. Ils ont une solide culture cinématographique et un bon sens de l’humour. Quant à moi, je donne cinq étoiles.
#devenir expert
J’ai aussi terminé de lire « L’expertise sans peine », un livre satirique qui explique comment devenir un expert dans les médias même si vous n’y connaissez rien. C’est jouissif. J’ai noté plein de passages, comme celui-ci où il compare un expert qui a de l’assurance à une chercheuse renommée:
Sait-il de quoi il parle? Qu'importe! Il a l'air de savoir de quoi il parle. Le seul fait qu'il en parle et soit invité à en parler ne suffit-il d'ailleurs pas à consolider cette impression?
Considérez encore cette scientifique inepte, gloire des universités, rabougrie, ratiocinant des phrases incompréhensibles à propos d'on ne sait quel produit chimique qu'elle aurait découvert et qu'elle présente comme «prometteur». Voyez les précautions interminables qu'elle s'impose en permanence. On lui demande si sa dernière étude a fonctionné, elle en détaille les limitations par le menu : c'est ennuyeux au possible, on s'endort!
À l'inverse, voyez cette experte des plateaux, frétillante, fraîche et élégante, vous assurant d'un ton décidé et joyeux que le jus frit de papaye est une véritable révolution, que bientôt la chute des cheveux, les attaques de panique ou l'érection en berne ne seront plus que de mauvais souvenirs. Voilà qui a de quoi faire frémir le chaland avide de savoirs scientifiques, pour le coup vraiment utiles et concrets.
Conclusion : n'ayez jamais peur de la bérézina que fut votre parcours académique. Ce n'est pas sur cela que vous serez jugé, loin s'en faut. Les winners académiques sont des losers de l'expertise, qu'on se le dise. Timorés, mal fagotés, rongés par le doute, rarement disponibles, ils ne possèdent tout simplement pas le bagout nécessaire à l'exercice. Laissons-les macérer dans leurs laboratoires et oublions-les dans leurs congrès insipides à l'autre bout du monde, où ils n'impressionneront que leurs semblables (et encore).
(J’ai été obligé de duckducker bérézina: Le nom de la Bérézina est resté dans le vocabulaire français comme un équivalent de « déroute », ou plutôt d'hécatombe, de graves pertes subies lors d'une situation complètement désorganisée. La bataille de la Bérézina n'est pourtant pas une défaite, mais au contraire une « victoire » de l'armée française.)
En gros, le livre donne plein de trucs pour dire n’importe quoi et donner l’impression qu’on s’y connaît. Consciemment ou pas, beaucoup d’intervenants dans les médias utilisent ces stratégies. Peut-être même moi, à l’occasion...
#immigration
Cette semaine, David Santarossa, qui essaie justement de faire sa place dans le milieu des médias, a écrit ceci à propos de l’immigration:
Je n’ai pas vraiment d’opinion sur l’immigration. J’ai trouvé un peu loufoque la guerre de chiffres lors des dernières élections. Sur le fond, il y a trop de tenants et d’aboutissants pour que je sache comment faire pour conserver la culture québécoise sans connaître un déclin démographique.
M. Santarossa a présenté tous les articles qui lui avaient permis de tirer ces conclusions. Patrick Déry lui a répondu en démontrant que tout ce qu’il disait était nuancé dans lesdits articles qu’il citait, ou qu’il oubliait certains facteurs externes. M. Santarossa lui a répondu en le qualifiant d’arrogant.
Cet échange m’a beaucoup fait pensé à L’expertise sans peine…
#le fléau woke
Joseph Facal, lui, a écrit la semaine dernière une chronique sur cette histoire d’un directeur d’école ontarienne poussé au suicide par les wokes (je résume grossièrement, mais pas tant). Rien d’étonnant, c’est un peu sa business, trouver des histoires un peu partout dans le monde et dire après: « regardez où la société s’en va ». Il n’est pas le seul à faire ça. Alors voici comment il résume l’histoire de M. Bilkszto:
En 2021, il participe à un atelier donné par le KOJO Institute pour «sensibiliser» les cadres du milieu scolaire à l’importance d’adopter le discours et les comportements de la doctrine EDI (équité, diversité, inclusion). [...] Pendant une séance, M. Bilkszto lève la main et intervient pour dire qu’il n’est pas d’accord avec ce qui vient d’être dit par l’animateur: que le Canada serait plus raciste que les États-Unis. Le Canada n’est pas parfait, fait-il valoir, mais ce n’est pas un enfer et c’est moins pire que les États-Unis. Pendant tout le reste de l’atelier, ce propos fut repris par le formateur comme illustration d’un propos typique du «suprémacisme blanc».
Finalement, c’était pas si simple que ça.
Le Star a obtenu une copie de l'enregistrement des deux séances en question d'une source qui était présente aux réunions. Sur cette base: Ojo-Thompson (l’animatrice de l’atelier) n'a jamais dit : « Le Canada est plus raciste que les États-Unis. » Elle n'a jamais qualifié Bilkszto de « suprémaciste blanc et résistant ». Les enregistrements révèlent pour la première fois une image plus complète de la conversation et du désaccord qui ont été triés sur le volet, dépouillés du contexte et des nuances, et présentés par ceux qui ont un programme visant à vilipender les initiatives en matière de diversité.
L’animatrice de l’atelier, si on lit l’article au complet, était sans doute trop intense et les responsables on peut-être mal géré ça, mais il semble vraiment qu’on ait ici surtout instrumentalisé le suicide de cet homme pour dénigrer le mouvement antiraciste.
#montréalisation
À part de ça, la « montréalisation » lancinante de la ville de Québec se poursuit. Ça me fait rire un peu de lire que de construire des pistes cyclables, du transport en commun et de retirer de l’espace aux voitures soient vus comme un exercice de montréalisation. Ce sont des aménagements que toutes les grandes villes dans le monde, ou celles qui aspirent à le devenir, font. C’est très rationnel comme changement, c’est ce qu’il y a de mieux pour améliorer la fluidité du réseau. Ça devrait plaire à la droite qui aime les données et l’efficacité, mais elle semble plutôt faire fi de la réalité pour satisfaire ses émotions, ses sentiments personnels.
À petite échelle, pendant le festival d’été, la ville a aménagé une piste cyclable au grand désespoir des animateurs de la radio locale. Finalement, la piste cyclable est un grand succès. Build it and they will come?
À Lévis aussi ça jase d’urbanisme. Comme le fait remarquer ce journaliste, des gens semblent être contre l’idée de favoriser une mobilité sécuritaire et efficace.
Faut avoir été beaucoup manipulé pour en arriver là. Ou bien ne pas être en mesure de comprendre une question.
Ceci dit, il y a dans cette phrase un bel exemple de la langue de bois de l’urbanisme qui des fois, je trouve, nuit à l’ensemble de l’oeuvre. C’est vague et vertueux, mais ça ne veut pas dire grand-chose.
#incroyable!!!
Une théorie du complot inattendue: Est-ce que ce zoo chinois déguise des humains en ours?
#musique
Un peu de post-punk irlandais, ça vous dit?
#citations
🔈 Diane Lebouthillier, après sa nomination comme ministre des Pêches
Je peux vous dire que j’aime le poisson.
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