Des entrepreneurs all dressed

Des entrepreneurs all dressed

C’est la semaine de relâche par chez nous, mais l’information (autrement) ne prend jamais de vacances. Ou presque. Cette semaine, dans la section cinq-étoiles-élite à la fin de cette édition, vous pourrez me lire au sujet de la fois où j’ai dû m’excuser auprès de Marcel Leboeuf.

En attendant, si vous avez des questions sur les coulisses du showbusiness, de la radio, ou des sujets desquels vous aimeriez m’entendre parler dans cette infolettre, des secrets que vous aimeriez que je révèle aux abonnés payants, je suis toujours preneur pour des questions. Vous n’avez qu’à m’écrire grâce au formulaire de contact sur mon site.

Les entrepreneurs positifs ont des croûtes à manger

Je viens d’une famille d’entrepreneurs. Mes grands-pères avaient démarré leurs entreprises (c’était moins à la mode pour les grand-mères de le faire, à l’époque, malheureusement). Mon père était entrepreneur. Ma mère était aussi dans le monde des affaires. Ma soeur et mes frères le sont aussi. Quant à moi, j’attends juste d’avoir terminé de siphonner tout l’argent de vos taxes avant de lancer mon propre empire médiatique. Sauf que tout ce beau monde n’est pas le type d’entrepreneur qui est prêt à tout pour faire parler d’eux. C’est peut-être nono d’avoir des principes en affaires, mais c’est comme ça.

En fin de semaine, Guillaume Abbatiello de Pizza Salvatoré s’est fendu d’un éditorial dans son char après être passé à l’émission de Marie-Louise Arsenault pour nous expliquer que si la culture allait mal, c’était peut-être parce que la sauce n’était pas assez relevée. Je ne m’attarderai pas sur la mauvaise idée de vouloir soumettre la culture aux lois du marché exclusivement, tout le monde en a parlé. J’ai fait un résumé de l’histoire à la radio. Je dirai juste que nous vivons dans un monde où tout se calcule en nombre de views et qu'il n’y a pas vraiment d’unité de mesure pour la qualité. Ceux qui pensent au format XLS en profitent. Tout peut arriver est une émission de radio de grande qualité, mais elle ne fait pas autant de views que les TikTok de deux minutes du livreur de pizza de l’heure.

Depuis quelque temps, certains de nos entrepreneurs ont décidé de profiter des réseaux sociaux pour se crinquer la notoriété. Pas en offrant du contenu de qualité, mais plutôt en dégobillant du rage bait à la pelletée pour attirer l’attention. On n’est plus dans « as-tu vu la pub de Meubles RD, elle est tellement bonne? » (mauvais exemple), on est dans « as-tu vu la vidéo du gars de Salvatoré comment il pète un plomb? ». Je suis presque nostalgique de l’époque où les pubs qui nous gossaient étaient celles du Clan Panneton ou de Barbie’s resto-bar grill. Maintenant, c’est sur les réseaux sociaux que tu rejoins le public qui consomme le plus, et pour rejoindre ce public, plusieurs décident de le mettre en crisse.

On voit donc beaucoup les héritiers de business familiales qui veulent se démarquer de leur papa en ayant une approche jeune et dynamique. C’est quasiment comme dans Succession, mais en plus ringard. Genre remplacez la Rolls-Royce par une Lamborghini usagée.

Ironiquement, Pizza Salvatoré a reçu des subventions pour « élaborer un plan d'adoption numérique », plan qui semble consister à attirer l’attention en semant la controverse. Leur modèle d’affaires est le même que celui des radios ou des influenceurs populistes qu’ils semblent suivre. Ils abordent les mêmes thèmes. Par exemple, il y a quelques semaines, Guillaume Abbatiello s’est fâché contre l’argent que l’on envoie en Ukraine.

Il ne faut pas tellement se surprendre que des entrepreneurs usent des mêmes tactiques que les populistes du moment. C’est parce que ça marche en ta. Trump est au pouvoir aux États-Unis avec le summum du techno bro à ses côtés, Elon Musk.

Éric Duhaime a d’ailleurs appuyé le dirigeant de Salvatoré. Je vois poindre à l’horizon un Québec dirigé par Duhaime avec un Abbatiello sur la kétamine chargé de couper dans l’État avec sa tronçonneuse. Non, non, ce n’est pas si dystopique. Duhaime a 36% d’intentions de vote dans la région de Québec selon les derniers sondages. Les choses peuvent changer vite.

Pendant ce temps, Élisabeth Abbatiello recevait dans le balado de l’empire du pepperoni le très louche Jean-Noël Sarto Lacroix. C’est le propriétaire d’Armoires PMM qui gueule comme un malade dans ses vidéos TikTok. Elle commence l’épisode en décrivant ainsi son balado: « un podcast dans lequel on reçoit des entrepreneurs qu'on est habitués de voir sur les médias sociaux, mais dont on ne connait pas vraiment tous les détails de la vie privée et de leur début en affaires. » Sarto Lacroix est soupçonné d’être lié au crime organisé. Ça aurait été utile de s’informer sur « les détails de sa vie privée » qui sont étalés dans les journaux avant de lui donner de la visibilité. Contrairement à ce que pense son frère, ça peut être utile, des recherchistes.

Dans cet épisode, Sarto explique qu’il se fout des critiques. En fait, il répond parfois à des commentaires négatifs sous ses vidéos et la meute se déchaîne à sa suite. Ça le fait tripper.

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C’est aussi ce qui fait le succès des influenceurs populistes dans nos médias: se foutre ben raide de sacrer le bordel. S’en réjouir même. Jubiler devant la chicane qu’on a générée. J’imagine qu’il y a une part de narcissisme là-dedans. Dans la même vidéo, Élisabeth Abbatiello raconte que son frère Guillaume a tellement de contraventions qu’il les conteste toujours pour retarder les points d’inaptitudes. Sans ça, il perdrait son permis. L’archétype de ce genre de personnage inclut d’être au-dessus des lois. D’ailleurs il avait fait jaser parce qu’il mangeait une pizza en conduisant.

Sarto Lacroix dit aussi dans cet épisode que les médias traditionnels, c’est terminé. Élisabeth Abbatiello confirme:

« N'importe qui demain matin peut aller sur les réseaux sociaux et devenir populaire s'il est pertinent. »

Je pense qu’elle confond « pertinent » et « crinqué dans l’tapis ». En fait, l’impertinence est pas mal plus payante.

François Lambert est certainement un pionnier de l’utilisation de l’opinion choc pour se faire connaitre et vendre des bébelles. J’ai joué son jeu à quelques reprises. Même qu’il a déjà déclaré avec candeur qu’il faisait exprès pour que je parle de lui à La semaine des 4 Julie.

« Julie, j'ai comme l'impression qu'elle me détestait parce que j'étais un peu comme elle. Elle avait toujours fait des stunts niaiseux pour faire parler d'elle. Et j'faisais des stunts niaiseux. Manger de la barbe à papa dans un lac gelé, là, à moins de 30, c'est niaiseux en tabarnouche, là, OK? Olivier Niquet, qui était chroniqueur à la semaine des cas de Julie, il a repris ça de un moment donné, pis là j'ai vu la face de Julie qui capote. Mais moi, j'suis pas un con, là. Pendant que je mange de la barbe à papa dans un lac glacé, là, pis que lui le met, ben c'est peut-être un million de personnes, des gens viennent voir mon site, des gens achètent. J'fais « Oh, OK, y'a un filon ici. » Moi, toutes les mardis, j'allais me mettre dans un bain de pop-corn, j'allais marcher dehors en chaise, j'faisais un paquet d'affaires pour que Julie parle de moi. Pendant ce temps-là, mes ventes montaient. »
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François Lambert - 13 mars 2023
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C’est fin, mais je pense qu’il surestime un peu la portée de La semaine des 4 Julie, et particulièrement la mienne. Reste qu’il fait exprès pour faire parler de lui, peu importe de quelle façon.

Bref, on nous offre exactement le même discours et les mêmes stratégies que les influenceurs du chaos, mais pour nous vendre des pizzas, du pop corn à l’érable ou d’autres cossins, et pour nous vendre un monde meilleur. Un monde meilleur pour eux bien sûr. Un monde où ils n’auraient plus besoin de payer pour la culture avec leurs taxes.

C’est plate parce que la majorité des entrepreneurs sont des personnes de qualité. L’entrepreneuriat responsable a la cote. Mais vous ne verrez pas les porte-étendard des entreprises éthiques, écolos et inclusives faire des vidéos en tabarnak dans leur char. Ou même sur leur vélo. Et malheureusement, dans le monde dans lequel on vit, ça peut vouloir dire que vous ne les verrez pas tout court…

Plogues

Le gigantopithèque

Aujourd’hui à La journée est encore jeune, je parle des influenceurs du petit Jésus (on a enregistré cet épisode d’avance) et vous pourrez y entendre Joël McGuirk, l’un des deux mâles alphas du documentaire du même nom, dire qu’il y a déjà eu des géants sur la terre et que sa blonde a étudié en archéologie et lui a confirmé la chose.

Ça adonne que depuis l’enregistrement, je suis tombé sur un épisode de l’émission La conversation scientifique sur le cerveau des humains préhistoriques et l’invité a évoqué les gigantopithèques, des singes disparus il y a 250 000 ans et qui pouvaient mesurer jusqu’à trois mètres. J’imagine très bien que l’on puisse inventer une théorie du complot autour de géants qui ont peuplé la terre à partir de leurs fossiles.

Je voulais juste vous faire savoir que ça a existé, un gigantopithèque pour que vous puissiez en parler dans votre prochain cocktail dinatoire.

Anxiété

Faites-vous de l’anxiété à cause de l’actualité? Comme tout le monde direz-vous. Un texte à ce sujet dans URBANIA:

L’ère de la peur
Comment naviguer sur la réduflation du confort.

Musique

Solide programmation pour La Noce. On se voit là-bas.

En attendant, cette semaine, j’ai découvert Saya Gray:

⚑ PREMIUM: Marcel Leboeuf et moi

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