Faut-il séparer l’humain du weirdo?

Après vous avoir fait faux bon la semaine dernière, je suis de retour de voyage et me suis rapidement remis dans le bain de l’information autrement. Pour ceux qui l’auraient manqué, j’avais enregistré cinq épisodes hors-série d’Olivier Niquet en jaquette où je présente les extraits audio que je n’avais pas utilisés à la radio depuis le début de la saison. Ça s’écoute ici, ici, ici, ici et ici.

Pour les abonnés de l’édition « premium » de cette infolettre, je vous propose quelques commentaires sur le site de marde Hockey30 et sur son traitement de l’épuisement de Jean-Philippe.

La ville lumière

Je ne vous ferai pas un compte rendu de ma semaine en Europe aussi exhaustif que celui de mon voyage au Japon, parce que tsé, Paris, c’est pas si exotique que ça. Mais j’ai noté quelques petits trucs quand même.

Pour une raison qui m’échappe, la moitié de l’UDA était à Paris en même temps que moi. On s’est donc donné rendez-vous Suzie Bouchard, Kim Lévesque-Lizotte et Marylène Gendron et moi pour aller voir une soirée d’humour au Paname, un équivalent de notre Bordel. Je ne connaissais aucun des humoristes et, on va se le dire, l’humour français, c’est souvent un peu chelou. Le premier humoriste était un américain, qui avait vraiment l’air d’un américain avec sa calotte et son accent cassé. Le gars a commencé en disant « Je m’appelle Robeurt, j’ai une accente weird, savez vous d’où je habitais? », ou quelque chose comme ça. Quelqu’un dans la salle a gueulé « du Québec »! Sacrés Français, faut être assez clueless pour penser que les Québécois parlent avec un accent de Westmount.

Par contre, je dois dire que ça a pris cinq jours (et c’est arrivé une seule fois) avant qu’un serveur ne s’obstine à nous parler en anglais. Toutes les autres fois, les Parisiens ont été fort sympathiques avec nous. Par ailleurs, c’est un cliché de le dire, mais c’est quand même effarant de voir le nombre de commerces ou d’affiches en anglais. C'en est relou.

Nous sommes aussi allés à Bruxelles rejoindre un ami pour boire de la bière et aller voir un concert d’Indochine. Je ne suis pas le fan numéro 1 d’Indochine, mais j’aime beaucoup, et ce sont quand même des légendes. Disons qu’ils ont beaucoup de chansons qui sont des « bangers » comme disent mes ados (et probablement les Français aussi). C’était un très bon show, très politisé, avec beaucoup d’effets spéciaux. Nicolas Sirkis a encore beaucoup d’énergie, même s’il ressemble à Claude Meunier.

Probablement que j'aurais moi aussi cette chevelure dans deux ou trois ans...

Trop long pour moi par contre. Deux heures et demie à rester debout pour quelqu’un qui a marché 15km par jour à Paris et à Bruxelles, c’était plutôt souffrant. Disons que je me serais passé des quinze tounes tirées d’albums récents que je n’avais jamais écoutés.

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Bref, un beau voyage.

Bien sûr, voyager de nos jours implique toujours un petit sentiment de culpabilité à cause de l’empreinte carbone. Mais pour ceux qui ont la chance d’aller ailleurs, c’est une maudite bonne façon de voir comment les choses fonctionnent pour s’en inspirer. Comme pour le Japon, je suis jaloux des systèmes de transports en Europe et de la place que l’on fait à la culture. Pourquoi nous aussi, on ne pourrait pas avoir de belles choses comme ça?

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Mélange des genres

Vous le savez, je m’intéresse beaucoup aux liens entre les médias traditionnels et leurs collaborateurs qui frayent avec les cercles complotistes.

Cette semaine, j’ai écouté Jacinthe-Ève Arel, qui était jusqu’à récemment panéliste à Zone Info de RDI et qui participe aux Débatteurs de Noovo. Elle était au « live » de Samuel Grenier, un des chefs de file du mouvement contre la vaccination et contre les mesures sanitaires pendant la pandémie. Il avait entre autres à l’époque relayé une publication qui disait que le centre de vaccination du Stade olympique était un abattoir. Je n’ai pas tout noté ses propos juteux de l’époque, mais il discutait régulièrement avec des adhérents saucés de théories du complot.

Pas grand-chose à signaler de sa discussion avec Jacinthe-Ève Arel. Ces gens radotent pas mal toujours les mêmes choses et c’est à se demander qui peut bien écouter ça, parce que c’est assez redondant. Sans doute des gens qui veulent être confortés dans l’existence de leur réalité parallèle. En même temps, j'ai écouté 53 heures de monde qui parle d'Ivan Demidov dans les deux derniers jours, alors je n'ai pas de leçon à donner.

Mais j’ai quand même tiqué sur ce bout.

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Je trouve que ça en dit long sur sa vision du monde de dire que Samuel Grenier est quelqu’un de nuancé. Imaginez comme l'axe de la nuance est déréglée.

Elle avait dit quelque chose de semblable au sujet d’Éloise Boies, une autre figure qui a émergé pendant la pandémie. Mme Arel l’a reçue à sa nouvelle émission au 99,5, la fréquence qui héberge QUB Radio. À la fin de la journée de QUB, c’est Mme Arel qui prend le relais. Elle avait décrit Mme Boies comme une « journaliste indépendante et documentariste » qui fait du travail d'enquête.

Mais Éloise Boies est aussi une personne qui parle de satanisme et qui s’inquiète des chemtrails, cette théorie du complot complètement loufoque qui dure depuis longtemps. Cette semaine, elle s’est inquiétée du ciel de Paris.

Je n’ai pas une très bonne mémoire, mais j’ai quand même de la difficulté à oublier et à faire abstraction de ce genre de chose. On se demande souvent s’il faut séparer l’humain de l’artiste, genre avec Bertrand Cantat, Woody Allen ou Alex Ovechkin (un artiste du one timer), mais j’ai de la misère à séparer le weirdo du commentateur de l’actualité. Si tu donnes la parole à quelqu’un qui croit aux chemtrails, qui pense que Satan règne sur Hollywood ou que les Américains ne sont pas allés sur la lune, j’ai tendance à me dire que tu manques de jugement.

Ces trois personnes sont aussi, en passant, des admirateurs de RFK Jr, qui encore cette semaine, promettait d’expliquer la cause de « l’épidémie d’autisme » d’ici septembre. Cette histoire de vaccins qui cause l’autisme est complètement farfelue et la guerre contre les vaccins de Kennedy a causé bien des dommages. Mais il s’inquiète parce que dans son temps, y’avait pas autant de diagnostics d’autisme:

« Ses données remontant à 2000 ont indiqué que 1 enfant sur 150 était diagnostiqué avec l’autisme. Kennedy est né en 1952, alors que l’autisme n’était pas encore étiqueté comme un diagnostic distinct, et les tests étaient limités. »

On va donc savoir en septembre ce que l’ont sait déjà: Il y a plus de cas parce qu’on est meilleurs à les diagnostiquer.

Tranquillement, ces gens qui sont capables de faire abstraction des folies de leur interlocuteur et leur accorder de la crédibilité pour parler d’autres sujets s’immiscent dans nos médias, soit parce qu’ils sont « bons en ondes », soit parce qu’ils représentent des voix que l’on entend pas assez dans les médias (comprendre, à droite). Or ce n’est pas être à droite que de croire à des réalités alternatives. Les vraies personnes à droite devraient être insultées d’être associées à ça.

Les views

Souvent, tout ce qu’on veut en invitant ces personnes, c’est d'attirer des « views », un baromètre complètement bidon pour évaluer l’influence d’une personne. C’est ce que dit ce texte de The Verge:

« Une “vue”, en réalité, n’est pas une mesure universelle. Ce n’est pas vraiment rien. C’est ce qu’une plateforme veut que ce soit, ce qui n’a généralement aucune corrélation réelle avec le fait que quelqu’un ait réellement rencontré et expérimenté un contenu. Vous pouvez simplement faire des vues ce que vous voulez ! Et si vous n’aimez pas l’apparence des chiffres, faites des vues autre chose ! Passons en revue quelques-uns d’entre eux, si vous voulez bien ? Les plus simples à comprendre sont les plateformes sociales : Instagram, TikTok, et (depuis la semaine dernière) YouTube Shorts comptent tous une vue dès qu’une vidéo commence à être diffusée. C’est objectivement absurde. Chaque fois que vous faites défiler, même si vous passez immédiatement à la vidéo suivante, la plateforme enregistre que vous avez regardé la vidéo comme si vous l’aviez vue en entier. C’est comme dire que si vous êtes dans un Best Buy et que vous passez devant une télévision diffusant Pirates des Caraïbes : Jusqu’au bout du monde, vous avez techniquement vu Pirates des Caraïbes : Jusqu’au bout du monde. Félicitations, vous êtes un pirate. »

C’est drôle parce que c’est un point sur lequel se basent les pirates lorsqu’ils veulent insulter quelqu’un sur les réseaux sociaux: « t’as yinque 1000 views ». Mais ça peut être 1000 views de personnes qui ont regardé toute la vidéo, ou 1000 views de personnes qui l’ont vu une seconde. Ce n’est pas un vrai indicateur.

En plus, comme je vous disais il y a deux semaines, il y a bien des influenceurs qui font juste acheter des visionnements…

Elgrably

Nathalie Elgrably est de plus en plus l’idole des influenceurs du chaos sur les réseaux sociaux. Voici le genre de publication qu’elle fait:

Donc ce n’est pas un complot, parce qu’il y a un article (elle ne met d’ailleurs qu’une capture écran) sur le site du WEF qui dit que manger des insectes pourrait être une bonne chose. C’est simplement basé sur le fait que les insectes rebutent les gens, mais il n’y a tellement rien de compromettant à dire que manger des insectes aiderait le climat. Personne ne va vous forcer en à manger…

De la télé au balado

Entrevue avec Marie-Claude Barrette, Jean-Luc Mongrain et Denis Lévesque:

Je me demande qui a le temps d’écouter tous ces balados…

Musique

Je dois avouer que j’ai beaucoup dansé dans mon char en écoutant cette toune de Fouki.

Faut-il séparer l’humain du weirdo?