Se sacrer du monde pour mieux l’influencer

Se sacrer du monde pour mieux l’influencer

Grosse semaine dans le monde du déneigement et j’en profite pour vous inviter à écouter Olivier Niquet en jaquette pendant que vous passez votre souffleuse. Ohdio m’a montré le palmarès des émissions les plus écoutées de la plateforme et si j’avais le droit d’en parler, je vous dirais que je suis haut en titi. Ajoutez un petit cœur à côté de ma face dans l’application, pour voir.

Olivier Niquet 24/7 (en jaquette)
À moitié endormi, Olivier Niquet commente l’actualité un café à la main tous les matins de semaine.

Pour les abonnés méga-top de cette infolettre, vous pourrez lire à la fin de cette édition que j’ai déjà presque été recherchiste pour l’émission Vlog et vous pourrez regarder une vidéo de Martin McGuire qui ne sait pas que son micro est ouvert.

Lâcher prise

Je me pose beaucoup de questions sur la meilleure façon d’être utile dans la sphère publique par les temps qui courent. Je ne dis pas que je ne lui suis pas, je me demande juste comment l’être plus. Et je ne parle pas de quantité. Je ne peux pas vraiment en faire plus. La radio, le balado, l’infolettre, les ti-vidéos sur TikTok, c’est assez. Je dois me garder du temps pour mes loisirs, comme aller à l’aréna ou revenir de l’aréna.

Mais je me questionne plutôt sur le ton (j’en ai glissé un mot il y a deux semaines). Je remarque que des gens qui ont toujours été nuancés se lâchent plus lousses depuis le retour de Donald Trump. Mon baromètre actuellement, c'est Yves Boisvert. Il me semble qu’il utilise des mots beaucoup plus fort depuis quelques semaines. Il a parlé de Trump qui utilise la terreur comme Staline. Il a cité Goebbels. Il a parlé de nettoyage ethnique. Je ne dis pas que je voudrais faire pareil. De toute façon, je ne connais pas assez l’histoire pour éviter de dire n’importe quoi.

Mais est-ce qu’il faudrait que je sois plus tapageur pour attirer l’attention sur les dangers qui nous guettent? Des fois je lis des textes comme ceux de Jean-François Nadeau dans Le Devoir, comme ceux du Père Duchesne ou comme celui-ci de Chris Hedges et je me demande si je ne devrais pas y aller all-in aussi.

« Les milliardaires, les fascistes chrétiens, les escrocs, les psychopathes, les imbéciles, les narcissiques et les déviants qui ont pris le contrôle du Congrès, de la Maison-Blanche et des tribunaux, cannibalisent la machine de l’État. »

La situation est si préoccupante (en tout cas, aux États-Unis) que le blogueur Jason Kottke a décidé de se consacrer entièrement à couvrir ce qui se passe avec Musk et la démocratie. Le gars un est designer Web, tsé.

Des gens m’ont dit que l’un de mes meilleurs textes était celui où je pognais les nerfs contre les revirements autour du 3e lien. Je m’étais permis d’être plus incisif puisque le texte est derrière un mur payant. Je serais sûrement capable de faire davantage dans l’éditorial choc. Ce serait assurément bon pour ma « popularité ». Ce le serait peut-être aussi pour le débat public. Plusieurs pensent qu’il faut répondre coup pour coup aux sautés du crinque qui dominent la sphère publique en ce moment. Mais est-ce que ce serait bon pour ma santé mentale? Pas sûr.

Le problème, c’est que je ne suis pas capable de me crisser des conséquences de ce que je dis. C’est pas mal ça la force des chevaliers de l’apocalypse sur les réseaux sociaux et les médias alternatifs (QUB, est-ce que c’est un média alternatif?). Ils s’en sacrent de foutre le feu. Ils sont détachés des commentaires qu’ils reçoivent ou des erreurs qu’ils font.

Souvent je me dis que je devrais retourner sur X et répondre aux tatas pour qu’ils n’aient pas complètement le champ libre. Mais ça m’affecte. Je n’ai pas envie de penser à un clown avec qui je m’obstine sur un réseau quelconque pendant que je suis en train de manger un délicieux pâté chinois avec ma famille. Surtout si je me doute que le clown en question, lui, n’y pense pas une maudite seconde. Je n’ai pas la même capacité de ces trolls rémunérés à la notoriété de m’en foutre. C’est la même chose pour les chroniques coup de poing. Il faut répondre de ses actes et je ne réponds même plus au téléphone, alors ce serait beaucoup m’en demander.

Ça a plus ou moins rapport, mais concept intéressant présenté par Chris Hedges: Le logocide.

« Ils parlent en termes et expressions familiers et réconfortants pour la plupart des Américains, mais ils n’utilisent plus les mots avec leur sens du passé. » Ils commettent un logocide, tuant les anciennes définitions et les remplaçant par de nouvelles. Les mots, notamment vérité, sagesse, mort, liberté, vie et amour, sont déconstruits et se voient attribuer des significations diamétralement opposées. »

Des fois, c’est peine perdue de s’obstiner avec quelqu’un qui change les définitions des mots en cours de route.

Plogues

Culture et société

Je parlais de l’importance de la culture la semaine dernière et je suis tombé sur une chronique d’un certain Cyril Dion (je sais pas c’est qui, mais je ne crois pas que sa maman Dion soit la même que celle de Céline), sur France Inter.

@france.inter

Cyril Dion démontre ici "le pouvoir de la fiction" - ou comment les films ou les romans peuvent modifier notre perception de l'Histoire... et aussi préparer de quoi sera fait demain.⁠ #cyrilDion #LaTerreAuCarré #psychologie #littérature #cinéma #Histoire

♬ son original - France Inter - France Inter

Il explique à quel point la fiction oriente notre perception du réel:

« Si je vous demande, quelle est selon vous la nation qui a le plus contribué à la défaite de l'Allemagne en 1945 ? Qu'est-ce que vous me répondriez ? (…) Cette question, l'Institut de sondage IFOP l'a posée à un échantillon représentatif de la population française en 1945. Et à l'époque, 57% des Français interrogés répondaient l'URSS et 20% les Américains. En 2015, l'IFOP a reposé la même question et la proportion s'est totalement inversée. 54% des Français disent désormais les Américains et 23% l'URSS. Pourquoi ce revirement ? En substance, parce qu'entre 1945 et 2015, plus de 200 films glorifiant l'épopée libératrice de l'armée de l'oncle Sam ont été diffusés et l'influence culturelle américaine a été quasi-hégémonique depuis.

Au sujet de l'importance de la culture, Émilie Nicolas nous disait dans Le Devoir jeudi:

« Il y a un truc dérangeant, voyez-vous, qui tend à se produire dans les salles de spectacle : l’émotion collective. Non seulement on peut s’émouvoir de la beauté, de la virtuosité de l’artiste, on se prend aussi à « rentrer » dans l’œuvre, même si on la sait très bien fictive. Lorsqu’on se retrouve par centaines ou par milliers à rire, à sourire ou à pleurer en même temps, nous ne sommes pas que « divertis » : on est aussi rattachés au « nous » de la salle, qui ressent au même instant une émotion semblable. »

C’est la culture qui construit le nous. C’est peut-être ça qu’a en tête Jean-François Roberge avec son idée de forcer l’inclusion de petits bouttes de culture du terroir dans les événements communautaires.

Selon Cyril Dion, c’est la culture qui inspirera la suite des choses, comme elle l’a fait par le passé: « Alors, plutôt que de montrer l'avenir comme une dystopie genre Mad Max ou Blade Runner, nous avons besoin de films qui imaginent comment on s'en sort. Des histoires d'amour dans des villes végétales et sans voitures, des mondes où nous partageons la planète avec les autres espèces, où le capitalisme a disparu. » Bon, le bout sur la fin du capitalisme, je sais pas, mais c’est vrai que pour aspirer à un monde meilleur, il faut le mettre en scène. Et pour le mettre en scène, faudrait investir dans la culture.

Bref, on est dans la chnoute.

Le plan d'affaire de marde de GNL

Je suis un grand défenseur de ce que font les médias (et c’est pas juste parce que je suis payé par un média). Je pense qu’ils sont en ce moment plus essentiels que jamais. Ça ne veut pas dire que je ne me pose pas des questions sur leurs pratiques.

Dernièrement, la couverture de la résurrection de GNL Québec m’a découragé. Ça fait longtemps que certains politiciens ou commentateurs de l’actualité prônent l’exploitation de nos ressources naturelles. Sauf que là, avec l’histoire des tarifs de Trump, c’est comme si les astres s’étaient alignés dans le commentariat de droite pour dire: « eille, la solution, c’est d’être moins dépendant des États-Unis en exploitant nos ressources et en facilitant leurs exportations en Europe. »

Des fois, je me demande si ces gens-là ont vraiment tous la même idée en même temps, ou bien s’ils ont juste un « chat » de groupe sur Messenger où ils se disent: « eille la gang, le timing serait bon pour promouvoir GNL. » Sûrement que non hein? Sûrement que ça se fait par mimétisme en s’entre-écoutant.

L’affaire avec GNL, c’est que le projet est mort parce qu’aucune entreprise ne veut le réaliser. Les perspectives sur le marché de l’énergie sont mauvaises ou au mieux imprévisibles. Construire un oléoduc prendrait dix ans alors que le problème des tarifs, c’est maintenant. La tendance est aux énergies renouvelables. Ce serait comme investir dans le passé. Bref, c’est un plan d’affaire de marde. Ironique, pour des gens dont les priorités sont l’économie et la business.

Mais comme les politiciens qui écoutent les chroniqueurs (et vice versa) en parlent, les médias en parlent. Les journalistes demandent aux autres politiciens de réagir au fait que leurs adversaires en parlent. L’idée se fait une place dans l’opinion publique et on en vient qu'à faire des sondages pour mesurer l’évolution de l’acceptabilité sociale autour de GNL. On se rend compte que les gens sont en majorité d’accord. Mais pourquoi ils sont d’accord? Je suppute que c'est parce que ça fait deux semaines que les médias en parlent en mettant ça en parallèle avec la guerre tarifaire et que la guerre tarifaire nous fait peur.

Il me semble qu’on devrait présenter ça ainsi: « Poilievre veut ressusciter GNL Québec, mais ce n’est que du vent ». Pas juste « Poilievre veut ressusciter GNL Québec ». À vouloir être trop neutres, certains se sont tirés dans le pied. Ça s’est vu ailleurs. Je suis content de voir qu'on commence à rectifier les choses dans le cas des oléoducs.

Ça m’a fait du bien d’en parler.

Réinfo

Nathalie Elgrably, chroniqueuse au Journal de Montréal et membre du C.A. de TVA relaie « l’enquête citoyenne » de Réinfo Québec, un mouvement assez louche issu de la pandémie.

La pandémie a été une vache à lait pour bien des gens et il y en a beaucoup qui veulent la traire jusqu’à la dernière goutte.

Boycottage et petits commerçants

Le boycottage a des effets pervers.

Quand les petits commerçants locaux paient le prix du boycott
L’effet secondaire indésirable de bouder le « Made in USA ».

Musique

Bon, c’était une semaine assez rap avec Kendrick Lamar, alors voici du Raccoon. Le rap de chez nous est un heureux mélange de références culturelles…

⚑ PREMIUM: Vlog et micro ouvert

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